Cogéré, un outil créé pour les agriculteurs par le Modef
C’est en 1979 que Robert TERRASSIER entre en contact pour la première fois avec le MODEF. En tant qu’expert comptable stagiaire, il avait la responsabilité financière de la SARL « L’exploitant familial », la société qui édite le journal du MODEF national à Angoulême.

Robert TERRASSIER
LA RENCONTRE AVEC LE MODEF
La rencontre avec le MODEF des Landes a eu lieu en 1980. Frédérik LINDENSTAAT et Jean-Jacques MONTURIER, des responsables nationaux, ont présenté le jeune Robert aux responsables du MODEF des Landes, notamment à Franck MARCADÉ, Bernard LABORDE, et Jean BOURLON. Les trois dirigeants étaient à la recherche d’une personne compétente pour mettre en place un centre de gestion agréé.
UNE PÉRIODE PROPICE
« La situation politique de l’époque nous était favorable » raconte Robert TERRASSIER. « En 1981, François MITTERRAND a été élu président. Son ministre de l’agriculture, Édith CRESSON, a légiféré afin d’obtenir une meilleure répartition des aides entre le MODEF et le syndicat majoritaire. Le MODEF a pu donc disposer d’une aide financière pour monter son centre de gestion agréé » continue t-il.
NAISSANCE DU CENTRE DE GESTION
Un « mini-service » de gestion existait déjà en 1980. Jacques DUCOS et Françoise FAURE en étaient les promoteurs. « Ma mission était de structurer le centre de gestion naissant et de le promouvoir auprès des agriculteurs landais. Obtenir l’agrément auprès de l’administration fiscale était le deuxième volet de ma mission » explique Robert TERRASSIER. En 1982, l’agrément fiscal et l’agrément statistique sont obtenus et la nouvelle structure est prête à travailler efficacement.
Le nom choisi par les dirigeants du MODEF est COGÉRÉ : centre de Comptabilité d’Organisation et de Gestion des Exploitations familiales agRicoles agréÉ.
UNE POLITIQUE D’OUVERTURE
Robert est embauché en 1982 en tant que directeur. Sa fonction était de développer le centre sous tous ses aspects : techniques, fiscaux et relationnels.
Depuis le début, les dirigeants de COGÉRÉ ont opté pour une politique d’ouverture. En effet, les services du centre ont été proposés à tous les agriculteurs landais, indépendamment de l’appartenance syndicale.
Développer une politique de transparence et de crédibilité a été un des premiers objectifs du centre de gestion. Dans ce but, un système de facturation basé sur le temps passé sur chaque dossier a été mis en place et des méthodes de travail rigoureuses ont été élaborées et appliquées.
La responsabilisation des agriculteurs a été le deuxième axe de travail. « Dans cette optique, des formations pour apprendre à tenir la comptabilité de l’exploitation ont été proposées » raconte Robert TERRASSIER. « Contre toute attente, ce fut un vrai succès » continue t-il.
COGÉRÉ ÉVOLUE TECHNIQUEMENT ET GÉOGRAPHIQUEMENT
Les services de comptabilité et de fiscalité ont été les premiers proposés aux agriculteurs. Un nombre croissant d’adhérents et une bonne santé financière ont permis ensuite à COGÉRÉ de proposer des services de gestion (calcul de la marge brute pour chacune des productions et analyse financière détaillée de chaque exploitation), un service social (gestion des payes des salariés), un service informatique (formation des agriculteurs à la saisie informatique) et un service juridique (sociétés et rural).
Mont de Marsan est le siège principal de COGÉRÉ. Ensuite, afin de faire face à un nombre croissant d’adhérents, les agences de Dax (1986), de Mugron (1992), de Langon (1999) et de Montauban (2005) ont été ouvertes.
« De 1982 à 2000, le nombre d’adhérents n’a jamais cessé d’augmenter » explique Robert TERRASSIER. « En 2000, on s’est stabilisé autour de 1.000 adhérents. Le nombre de salariés, quant à lui, est stable à 38 » continue t-il.
« Sur le plan technique, nous sommes passés en quelques années du crayon à papier à la souris, du cahier d’enregistrement à Internet, en passant par la disquette, le CD et la clé USB » fait remarquer Robert.
COGÉRÉ FACE À LA RÉFORME DE 2006
En 2005, la loi a introduit des changements dans l’exercice de la profession comptable. En 2006 et 2007 COGERE s’est adapté à la nouvelle législation : le centre de gestion se divise en deux entités autonomes : CÉGÉRÉ et COGÉRÉ.
Le premier hérite de l’agrément de COGÉRÉ et continue à s’occuper des dossiers agricoles, tandis que le deuxième obtient un nouvel agrément (conféré par la « Commission article 42 ») afin de pouvoir être à égalité avec les experts comptables et traiter les dossiers non agricoles. COGÉRÉ, quant à lui, a changé de statut et est devenu une AGC (Association de gestion et de Comptabilité).
L’AVENIR DE COGÉRÉ-CÉGÉRÉ
Après le départ à la retraite de Robert TERRASSIER, une co-direction sera mise en place par 8 personnes organisées en 4 pôles (finances, ressources humaines, stratégie et communication).
« Mon style de management a été guidé en permanence par la conservation des grandes équilibres, entre intérêt individuel et collectif, entre intérêt pour les salariés et intérêt pour les adhérents, entre l’économique et le social. J’ai essayé d’être juste et de tenir la distance », analyse Robert.
« Pour la nouvelle équipe de direction, la cohésion entre eux tous sera un facteur fondamental de la réussite du projet », déclare Robert. « L’engagement dans le monde agricole doit continuer sans oublier la fonction de conseil » poursuit-il.
LE MÉTIER D’AGRICULTEUR : LES ÉCARTS DE REVENUS SE CREUSENT…
26 ans de carrière au sein du centre de gestion ont permis à Robert TERRASSIER de voir de près les évolutions du monde agricole.
« La chute des prix agricoles, pratiquement dans tous les secteurs d’activité, a été une des tendances marquantes des derniers 20 ans » précise Robert. « Toutefois, les écarts de revenus en fonction des productions et de la situation géographique n’arrêtent pas de se creuser » analyse-t-il.
…ET LES ATTENTES SOCIÉTALES SE MULTIPLIENT
« Les attentes sociétales vis-à-vis des agriculteurs ont aussi changé » souligne Robert. « Autrefois, on demandait aux agriculteurs d’être des producteurs, tandis qu’à nos jours on leur demande aussi d’être des gestionnaires des espaces, des commerçants, des administratifs et des acteurs du développement durable » explique-t-il.
Robert TERRASSIER remarque également que les contraintes administratives ont augmenté considérablement, ainsi que les moyens technologiques et informatiques. « J’ai été frappé par la capacité des agriculteurs de s’adapter à toute situation » raconte Robert.
LA POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE
En aidant les agriculteurs à remplir leurs dossiers PAC, COGÉRÉ a vu évoluer cette politique. Le soutien des prix a laissé la place à l’aide à la production. Cette dernière a été enfin remplacée par l’aide à l’exploitation. « Aujourd’hui, c’est l’incertitude la plus totale et l’avenir n’est pas lisible » commente Robert.
Selon Robert TERRASSIER, une politique agricole devrait intégrer des mesures sérieuses pour favoriser des systèmes de cultures plus éco compatibles. Selon lui, l’agriculture locale devrait être mise en avant.
« La terre n’est pas un don de nos parents ; ce sont nos enfants qui nous la prêtent » est un proverbe indien, accroché au mur de mon bureau depuis des années et qui reflète mon état d’esprit » déclare Robert. « Malheureusement, de nos jours, toute politique humaine est trop dépourvue de vision à long terme. La terre vit au rythme du cosmos et nous, au rythme des échéances électorales » poursuit Robert. Comment gérer cet immense décalage ? « Revenir aux fondements de l’économie agricole et reprendre conscience de la fonction de l’agriculture, qui est nourrir les hommes, pour simplement vivre ». « Cette pensée permettrait de voir de manière différente les agriculteurs, la fonction alimentaire issue de l’agriculture et les politiques associées » conclut Robert.