Les jours qui viennent seront décisifs pour l’agriculture dans le bassin de l’Adour... Malgré plusieurs entrevues et échanges entre les services de l’Etat et les représentants d’Irrigadour au cours des dernières semaines, avec l’objectif
d’obtenir un compromis entre le besoin de prélèvements en eau recensé auprès des agriculteurs (environ 206 Mm3, comme les années passées) et la trajectoire baissière des autorisations imposée par les services de l’Etat depuis trois ans déjà, le Préfet coordonnateur de l’Adour, sous la direction du Préfet de bassin à Toulouse, a publié à la consultation du public, un projet d’arrêté qui entraine, sur certains secteurs, des réductions de 20 à 40 % des autorisations de prélèvements d’eau pour l’irrigation, en rivières non réalimentées et nappes d’accompagnement du bassin de l’Adour.
Selon irrigadour, « cette posture va entraîner des conséquences économiques désastreuses pour plus de 1500 exploitations agricoles impactées par une autorisation de volumes prélevables qui serait en baisse globale de 20 millions de m3 par rapport aux besoins exprimés. Cette baisse globale des autorisations représenterait un équivalent de plus de 10 000 ha de surfaces irriguées en moins dès 2025, alors même que des solutions existent à moyen terme sur le bassin pour retrouver un équilibre quantitatif durable jusqu’à 2050. Toutes les productions agricoles sont concernées. »
La posture du préfet de bassin est d’autant plus regrettable que pour une fois, et sous l’impulsion de son nouveau président Paul Carrère, Irrigadour avait fait un pas en direction des pouvoirs publics en proposant un volume prélevable de 198 Mm3 pour la campagne 2025 (-5 Mm3 par rapport à 2024). Une stratégie de recherche du compromis soutenue par le Modef des Landes. Mais cette proposition a été balayée par le Préfet de Bassin qui reste sur un arrêté inter-préfectoral (AIP) pluriannuel 2025-2027 à 188 Mm3, conformément à la trajectoire des volumes notifiés de 2020.
Pour certains périmètres et bassins versants, comme le Midour Aval, cela se traduit par des baisses pouvant atteindre 42 % des volumes prélevables dès cette année et 66 % en 2027 ! Tous les secteurs sont concernés par des baisses obligatoires (excepté Aval Campagne), sans discernement, alors que l’Agil proposait de répartir la baisse des volumes sur les différents secteurs en fonction des besoins et des typologies de cultures, afin d’amortir le choc. Proposition écartée également par le préfet de bassin.
Oui à l’adaptation, non à la disparition !
Le Modef des Landes dénonce l’intransigeance des services de l’Etat alors que la profession avait enfin choisi la voie du dialogue et de la responsabilisation, après des années de bras de fer qui ont conduit à la perte de l’AUP et aux mesures dérogatoires que nous connaissons.
Après l’aveuglement des uns, voici l’intransigeance des autres. Une situation que déplore Sébastien Bayle, administrateur du Modef, vice-président de l’Agil et kiwiculteur à Souprosse : « Nous réclamions à la fois une baisse modérée des volumes et surtout qu’il n’y ait pas d’inégalités entre ls trerritoires. Le préfet des Landes semblait réceptif à cette idée de répartir équitablement ce qui aurait entraîné une baisse de 7 % pour tout le monde. Mais ce n’est pas du tout ce qu’il s’est passé. »
Car le préfet de bassin est resté campé sur sa position de baisse de 5 Mm3 par an. « Moi, je tombe à 1 200 m3/ha au lieu de 1 800. Je fais deux tours, je bouffe la moitié du quota. C’est pire pour d’autres qui vont subir des baisses sur les deux prochaines années pour tomber jusqu’à 600 m3. Là, tu ne lances même pas l’arrosage. Si ça reste comme ça, on n’aura pas d’autre choix que la désobéissance, surtout avec l’été qui s’annonce. »
Le Modef des Landes s’insurge contre la vision monolithique et purement comptable des services de l’Etat et réclame une gestion fine des volumes en fonction des territoires et des cultures, en priorisant les usages destinés à l’alimentation humaine et animale locale !
Il réclame des financements publics à la hauteur des enjeux pour l’aménagement de retenues collinaires et rappelle que si les projets ne se font pas, c’est par manque d’argent et non à cause de normes soi-disant trop complexes (plus de 80% des projets présentés sont acceptés mais non-financés).
Il réclame un accompagnement financier et technique à la hauteur de la transformation qu’on exige du monde paysan face aux tensions croissantes sur la ressource en eau, que plus personne, professionnels comme citoyens, ne saurait nier.
Quelques jours après la publication du projet d’arrêté, le président d’Irrigadour Paul Carrère a convoqué tous les acteurs du bassin à une réunion publique à Barcelonne-du-Gers le jeudi 10 juillet pour définir une position commune. Car le combat ne fait que commencer.

